Focus marché

FLASH MARCHÉS FINANCIERS

Le 07/04/2025
Nous vous proposons dans ce flash de faire le point sur les marchés financiers, dont le sort reste très lié aux dénouements de la « guerre commerciale » déclenchée par l’administration Trump. Nous vous communiquons également les principales informations relatives aux opérations de gestion financière réalisées pour adapter les portefeuilles, ainsi que les orientations stratégiques que nous pourrions mettre en œuvre dans les prochains jours ou semaines.

Pourquoi les marchés ont-ils été choqués par les annonces, le 2 avril, de hausses des droits de douane par les Etats-Unis ?

Par rapport à leurs points hauts les principaux ajustements sont les suivants : de l’autre côté de l’Atlantique, le S&P500 a perdu 22%, l’indice Nasdaq (grandes valeurs de la Tech) 25% et le dollar s’est déprécié de 10% par rapport à l’euro. En Europe, l’indice Eurostoxx 50 (grandes valeurs de la zone euro) et le CAC 40 ont lâché 18%. Enfin, en Asie, les actions chinoises domestiques ont reculé de 13%.

 

Même si l’arme des droits de douane était clairement une mesure centrale du programme économique et géopolitique du 47ème Président américain, les marchés financiers ont été surpris par l’ampleur des surtaxes imposées par les Etats-Unis à l’ensemble de ses partenaires économiques. En imposant un taux minimum universel de 10%, Washington a en effet retenu comme dispositif plancher l’un des pires scénarios redoutés par les investisseurs. Bien entendu, les dégâts économiques et financiers risquent d’être encore plus conséquents si les taux de droits de douane maximum par pays ou par zone étaient réellement appliqués (+34% pour la Chine et +20% pour l’Union Européenne).  

 

Quels impacts a minima de la hausse brutale des droits de douane imposés par Washington ?

Les surtaxes douanières doivent être considérées comme des équivalents de hausses de taxes et d’impôts qui auront pour conséquence a minima de réduire la croissance économique et d’augmenter le rythme de l’inflation. Cette dégradation des perspectives économiques pourrait même se transformer en véritable récession, ou pire en stagflation (récession et inflation élevée), notamment en cas d’escalade protectionniste généralisée et durable. Par ricochet, et c’est ce qui explique en grande partie la chute des marchés, les attentes de profits des sociétés risquent d’être sensiblement revues à la baisse.   

 

Quels sont les facteurs potentiellement aggravants de cette « guerre commerciale » ?

 

Au-delà des risques de surenchères protectionnistes (Pékin a déjà annoncé qu’elle riposterait au pourcent près aux +34% imposés par Washington), deux éléments pourraient aggraver une toile de fond déjà abimée. En premier lieu, ce choc économique et géopolitique (Washington semble avoir tourné le dos à l’Occident) survient dans un contexte où, malgré les forts reculs de ces dernières semaines, les valorisations fondamentales des actifs financiers américains (actions et dollar) restent au-dessus des moyennes historiques. S’agissant des actifs européens, ce constat est bien moins handicapant mais leur sous valorisation n’est pas encore statistiquement significative. En second lieu, Washington pourrait non seulement relever davantage ses tarifs douaniers en cas de ripostes de ses partenaires pour les porter à +68% pour la Chine et +39% pour l’Union Européenne, mais surtout passer à une sorte de tensions financières notamment en dévaluant de manière unilatérale le dollar.

 

 

Quels sont les facteurs possiblement apaisants de cette dégradation de la toile de fond des marchés financiers ?

 

Les impacts macroéconomiques, moins de croissance et plus d’inflation, et microéconomiques, moins de profits, seront moins aigus si Washington et ses partenaires arrivent à trouver des compromis pour limiter cette inflation des tarifs douaniers. 60 pays auraient déjà approché Washington pour tenter de trouver des accords afin de réduire ou d’éliminer ces barrières douanières (suppression des droits de douanes actuels appliqués aux exportations américaines, engagements à acheter plus de produits américains …). L’administration Trump pourrait dans ce cas plus rapidement et plus facilement activer les mesures de son programme jugées positives par les investisseurs : les baisses d’impôts et l’assouplissement des contraintes réglementaires (un départ d’Elon Musk serait à cet égard également probablement positif puisqu’il serait synonyme de fin des restrictions et coupes budgétaires actuelles). Par ailleurs, des mesures de soutien de la demande domestique (consommation et investissement) ont déjà été annoncées notamment par la Chine et l’Europe pour contrebalancer la possible, probable, baisse de la demande externe (exportations). Le « bazooka » budgétaire allemand, 1000 milliards de dépenses supplémentaires, et plus généralement l’engagement des pays du Vieux continent à fortement accroitre leurs dépenses militaires illustrent ce sursaut européen et cet activisme économique des Etats. De plus, les banques centrales devraient pouvoir continuer de réduire leurs taux d’intérêt en estimant que les risques pesant sur la croissance économique sont plus élevés que les menaces inflationnistes. Enfin, la détente des taux obligataires et le fort recul des prix du pétrole sont également des facteurs de soutien.

 

Quels sont les ajustements que nous avons ou que nous pensons réaliser dans les mandats de gestion ?

 

Après avoir été globalement surpondérés sur les actions et géographiquement sur les titres américains depuis la victoire de D Trump, nous avons progressivement, à partir de la mi-janvier, réduit nos expositions pour passer en sous pondération dès le début du mois de février. Cette réduction du risque global des portefeuilles était principalement motivée par la décision de l’administration américaine de se concentrer sur les mesures protectionnistes et migratoires plutôt que sur les mesures de baisse d’impôts, par la nette et soudaine détérioration des indices de confiance Outre-Atlantique, mais aussi par la progression très vive des bourses européennes depuis la fin de l’année dernière. Nous avons également opéré dans ce mouvement de prudence un renversement géographique offensif en favorisant l’Europe et la Chine et en abaissant sensiblement le poids des actions américaines ainsi qu’en couvrant une partie de l’exposition au dollar. Ce basculement entre les actifs financiers américains et ceux du reste du monde a été renforcé à la suite de l’annonce du « bazooka » budgétaire par le nouveau Chancelier allemand F Merz.

 

Nous considérons que la toile de fond des marchés financiers a été « abimée » mais pas encore « déchirée ». La probabilité du scénario de récession, voire de stagflation, a bien entendu nettement augmenté et pourrait probablement justifier une poursuite de la correction des marchés. Pour autant, et malgré une visibilité très faible (surenchères protectionnistes ou désescalades via des négociations ?), nous ne retenons pas en scénario central une récession de l’économie mondiale mais plutôt un ralentissement marqué et un surcroit d’inflation transitoire en raison notamment de politiques budgétaires et monétaires expansionnistes. Nous estimons également que le sursaut européen devrait se renforcer avec possiblement une plus grande mutualisation des dépenses d’investissement et des réformes structurelles en zone euro (mise en œuvre des grandes lignes du plan Draghi par Bruxelles). Dans ces conditions, et compte tenu de l’ampleur et de la rapidité des ajustements boursiers, nous devrions pouvoir réallouer, même dans une optique tactique de court terme, une partie de nos liquidités en gardant stratégiquement notre préférence pour les actifs non américains.  

 

 

 

 

Rédigé par la Direction de la Gestion sous Mandat de Louvre Banque Privée le 7  avril 2025 à 13 h 00