Actualité patrimoniale

Les nouvelles règles de déduction du passif de l’IFI

Le 24/09/2024
La loi de Finances 2024 a profondément modifié les règles de détermination de l'assiette imposable des biens immobiliers détenus par l'intermédiaire d'une société. Cela concerne 55% des personnes assujetties à l’IFI.

IFI définition et principe

L'impôt sur la fortune immobilière (IFI) concerne les contribuables ayant un patrimoine immobilier net supérieur à 1,3 million d'euros au 1er janvier de l’année d’imposition. La déclaration de l’IFI s'effectue au même moment que la déclaration de revenus.

 

Tout le patrimoine immobilier, à l'exception, sous conditions, des biens professionnels, entre dans le périmètre de l'IFI :

- Les biens immobiliers bâtis (à usage personnel ou mis en location) : maisons, appartements et leurs dépendances (garage, parking, cave…) ;

- Les biens immobiliers en cours de construction au 1er janvier 2023 ;

- Les biens immobiliers non bâtis (terrains à bâtir, terres agricoles…) ;

- Les biens immobiliers ou fractions de biens immobiliers représentés par des parts de sociétés immobilières (SCPI, supports immobiliers dans l’assurance-vie…) ;

- Les droits immobiliers (usufruit, droit d’usage ou d’habitation…).

 

Bon à savoir

Depuis sa mise en place en 2018, les recettes fiscales générées par l'IFI ont progressé de plus 45% compte tenu de la progression du nombre d'assujettis : de 1,29 milliard d'euros en 2018 à 1,9 milliard d'euros en 2023, d'après la DGFIP. C’est deux fois moins que l’ISF (4,2 milliards en 2017).

Immobilier détenu en direct : les dettes déductibles

Soumis à un barème progressif, l’IFI s’applique à une assiette de la valeur nette du patrimoine, c’est-à-dire une fois les dettes déduites de ce dernier. Ces dettes déductibles doivent être liées à l’acquisition ou à la conservation de biens ou de droits immobiliers taxables. Parmi elles, figurent :

  • Les dettes contractées pour l'acquisition de biens ou de droits immobiliers imposables : les prêts immobiliers
  • Les dépenses effectuées en tant que propriétaire pour le financement de travaux (factures non encore réglées au 1er janvier de l’année n) : réparation, entretien, amélioration, construction, reconstruction ou agrandissement.
  • Les impositions liées à la propriété : taxe foncière, taxe sur les locaux vacants, sur les bureaux en Île-de-France, les droits de mutation en instance de paiement.
  • L’IFI “théorique” de l’année en cours, dû sur le montant du patrimoine net au 1er janvier 2024.

Bon à savoir

Certaines dettes ne sont pas déductibles de l’assiette de l’IFI :

- La taxe d'habitation, l'impôt sur le revenu (sur les revenus fonciers notamment) et les prélèvements sociaux grevant le revenu foncier du propriétaire bailleur.

- Les dettes contractées pour l’acquisition ou les dépenses de travaux concernant des biens détenus en seule nue-propriété, ou alors totalement exonérés (comme un immeuble professionnel).

- Les prêts contractés, directement ou indirectement, auprès d’un membre de votre foyer fiscal ou auprès d’un membre de la famille.

Immobilier détenu indirectement : les dettes déductibles avant la réforme de 2024

L’immobilier détenu en directement concerne les biens détenus par une société civile immobilière (SCI), une société commerciale ou encore une holding patrimoniale. Jusqu’en 2023, presque l'intégralité des dettes pouvait être intégrée au passif déductible, à savoir les emprunts immobiliers et les autres dettes de la société, comme les dettes financières.

 

Le calcul de l’assiette de l’IFI dans le cadre de la détention immobilière en indirect était alors calculé comme suit :

 

Assiette de l’IFI = Ratio immobilier × Valeur vénale des titres de la société

 

Avec :

- Le “ratio immobilier” correspondant au montant des actifs immobiliers par rapport au montant de l’ensemble des actifs de la société.

- La “valeur vénale des titres de la société” correspondant au montant total des actifs de la société moins l’ensemble des dettes de la société.


Voici un exemple avec un bilan comme suit :

 

ACTIF

PASSIF

 

Capital social

1 M€

Actifs immobiliers

3 M€

Emprunts immobiliers

2 M€

Actifs financiers

3 M€

Dettes financières

3 M€

ACTIF total

6 M€

Passif TOTAL

6 M€


Le ratio immobilier du bilan est de 0,5 (3 millions d’euros d’actifs immobiliers divisés par 6 millions d’euros d’actifs au total) et la valeur vénale des titres est de 1 million d’euros (6 millions d’euros d’actifs au total - 5 millions d’euros de dettes, dont 2 millions d’euros d’emprunts immobiliers et 3 millions d’euros de dettes financières). L’assiette de l’IFI était donc de 500 000 euros (0,5 x 1 M€).


Or, si ce même bien immobilier était détenu en direct, avec le même emprunt bancaire, l’assiette IFI aurait été de 1 million d’euros (valeur du bien de 3 millions d’euros - montant de l’emprunt de 2 millions d’euros). Autrement dit, jusqu’en 2023, la détention d’immeubles en société pouvait provoquer un effet d’aubaine s’il existait un passif social non afférent à l’actif immobilier imposable. L’IFI sur les parts de la société pouvait être moins élevé par rapport à un immeuble détenu en direct.

 

IFI : ce qu’a changé la réforme 2024

La réforme de l’IFI (paragraphe IV de l’article 973 du CGI a ainsi été voté par l’article 27 de la LF2024) entrée en vigueur le 1er janvier 2024 introduit plusieurs limitations significatives visant à encadrer les déductions de dettes au sein des sociétés pour les contribuables. Objectif : aligner l’assiette de l’IFI des contribuables possédant un patrimoine immobilier via une société sur le régime applicable aux détentions directes.

 

Elle instaure que seules les dettes afférentes aux actifs imposables à l’IFI peuvent venir amoindrir l'assiette d'imposition, comme le montant des emprunts immobiliers restant à rembourser, les dépenses de rénovation, la taxe foncière ou encore les apports de compte courant ayant servi au financement du ou des actifs immobiliers dans le champ de l'IFI.

 

Le saviez-vous ?

55,8% des foyers redevables de l’IFI détiennent des immeubles par l’intermédiaire de sociétés selon la Direction générale des Finances Publiques. Ils se voient donc concernés par la réforme opérée par la loi de Finances 2024.

En outre, pour éviter que ce changement de règle aboutisse à une valeur théorique du patrimoine imposable supérieure à sa valeur réelle, la loi de Finances 2024 a introduit deux plafonds. Ainsi, la valeur déclarée à l'IFI ne peut dépasser :

- Ni la valeur totale des immeubles nette de leurs dettes propres,

- Ni la valeur réelle de la société.

Ainsi, le redevable retient le plafond le plus faible des deux, soit le plus intéressant pour lui.

 

Exemple de calcul de l’assiette de l’IFI post-réforme 2024

Selon notre exemple, avec la réforme sur la déduction du passif de l’IFI dans le cadre de la détention immobilière en indirect, l’assiette de l’IFI triple par rapport à avant la réforme, passant de 500 000 euros à 1,5 million d’euros.

 

En effet :

- Le ratio immobilier reste à 0,5 (3 millions d’euros d’actifs immobiliers divisés par 6 millions d’euros d’actifs au total) ;

- La valeur vénale des titres passe de 1 million d’euros à 3 millions d’euros (6 millions d’euros d’actifs au total - 3 millions d’euros d’emprunt immobilier), la dette financière non immobilière n’étant plus déduite.


À 1,5 million d’euros, l’assiette de l’IFI, pour des biens détenus indirectement, devient supérieure à celle retenue en cas de détention directe (à 1 million d’euros dans notre exemple). Une injustice compensée par l’instauration du “double plafond”, qui prévoit qu’in fine, l’assiette de l’IFI en indirect ne peut dépasser la plus faible de l’une de ces deux sommes :

- La valeur totale des immeubles nette de leurs dettes afférentes, ici égale à 1 million d’euros (3 millions d’euros – 2 millions d’euros).

- Ni la valeur réelle de la société, également à 1 million d’euros (6 millions d’euros - 5 millions d’euros).


Ainsi, l’assiette de l’IFI en indirect retombe à 1 million d’euros, équivalant celle retenue dans le cadre de la détention directe. La réforme fait ainsi respecter l’égalité entre détention directe et indirecte.

 

Comment diminuer la facture de l’IFI

Il existe des outils pour réduire la facture de l’IFI sans avoir à céder son patrimoine. Parmi elles :

- Faire un don à des organismes d’intérêt général permet de déduire de l’IFI 75% du montant des dons dans la limite de 50 000 euros par an et par foyer fiscal (correspondant à un montant total donné de 66 667 euros).

- La donation temporaire d’usufruit, à son ou ses enfants, tout en conservant la nue-propriété. Le bien sort alors du calcul de l’assiette de l’IFI du nu-propriétaire pendant une période déterminée.

- L’investissement en nue-propriété : le principe consiste à acheter la nue-propriété d’un ou plusieurs appartements, pour le ou lesquels un bailleur social acquiert un usufruit temporaire, généralement pendant 15 à 20 ans. Ce type d’acquisition est assorti d’une forte décote et permet de se constituer un patrimoine sur le long terme, dont l’usufruit devient disponible au moment du départ à la retraite.