La loi “Industrie verte” met le private equity à contribution
Le 03/07/2024La loi “Industrie verte” veut doper la transition écologique
Promulguée en octobre 2023, la loi dite Industrie verte a pour objectif affiché de « faire de la France la première nation européenne de l’industrie verte ». Elle ambitionne de mobiliser 67 milliards d’euros d’ici à 2030 pour réindustrialiser la France et axer sa production sur la transition écologique, via le soutien de secteurs clés comme les énergies renouvelables et l’agriculture durable.
Soutenir le tissu industriel et flécher les financements privés
Parmi sa quarantaine de mesures, plus de la moitié concerne directement le tissu industriel, avec par exemple l’allégement des procédures administratives pour les projets industriels d’intérêt national majeur (PIINM) ou la création d’un crédit d’impôt “investissements industries vertes” (C3IV).
Mais la loi “Industrie verte” vise aussi et surtout à accélérer le fléchage des financements privés vers la transition écologique. Pour ce faire, dès le 1er juillet 2024, l’Etat a lancé le Plan d'Épargne Avenir Climat (PEAC), destiné aux jeunes de moins de 21 ans. Et à partir d’octobre 2024, les assureurs auront l’obligation d’investir une part minimale des fonds sur des actifs non cotés en Bourse et axés sur l’écologie.
Le private equity mis à contribution
En clair, les Français plaçant leur argent en assurance-vie ou sur un Plan épargne retraite (PER) via un assureur, un banquier ou un courtier en gestion pilotée vont voir une partie de leur épargne obligatoirement investie dans le secteur du private equity, également appelé “capital-investissement” ou “capital risque”. Ces fonds investis dans des entreprises (PME, ETI…) non cotées en Bourse, devront afficher l’un des deux labels délivrés par l’État, à savoir le label ISR pour “Investissement socialement responsable” visant des entreprises respectant au moins un des critères ESG (Environnement, social, gouvernance), et le label Greenfin ciblant les activités directement liées à la transition énergétique et à la lutte contre le réchauffement climatique.
Bon à savoir La loi Industrie verte confirme la volonté de l’exécutif de dynamiser les investissements privés vers le private equity. En 2015, la loi Macron a d’abord ouvert l’accès des actifs non cotés via l’assurance-vie, puis en 2019, la loi Pacte l’a étendu aux PER. |
La loi concerne l’assurance-vie et les PER en gestion pilotée
Dans le détail, cette obligation introduite par la loi relative à l’Industrie verte concerne uniquement les contrats d’assurance-vie et les plans d’épargne retraite (PER) souscrits en gestion pilotée, et seulement pour des profils dits “équilibrés” ou “dynamiques”. Si vous choisissez la gestion pilotée, l’assureur sélectionne les supports d’investissement adéquats en fonction de votre profil d’investisseur, dépendant de vos caractéristiques (âge, situation professionnelle et patrimoniale, aversion au risque…), de vos objectifs financiers, et de votre horizon de placement. Il existe trois principaux profils d’investisseurs : prudent, équilibré ou dynamique.
Concernant l’assurance-vie, la loi prévoit d’instaurer une part minimale d’unités de compte investie dans des fonds d’actifs “verts” non cotés en Bourse comme suit :
- Pour un profil « Équilibré », composé jusqu’à 7% d’actifs risqués : le private equity “vert” doit représenter au minimum 4% des investissements (dont 15% seront obligatoirement fléchés vers les fonds small caps).
- Pour le profil « Dynamique », composé de plus de 70% d’actifs risqués : le private equity “vert” doit représenter au minimum 8% des investissements.
Quant au PER, pour le profil « Équilibré » (représentant le profil instauré “par défaut” au moment de la souscription), l’investissement non coté devra peser entre 3% et 8% en fonction du terme du contrat. En effet, selon la loi, plus vous approchez de la retraite, moins vous êtes exposé aux actifs non cotés et plus risqués.
Ainsi, la loi Industrie verte ne concerne pas les profils dits “prudents”, c’est-à-dire les plus averses au risque. Elle n’impacte pas non plus les contrats d’assurance-vie et les PER opérés en gestion libre.
Bon à savoir Des discussions sont en cours entre les pouvoirs publics, les assureurs et les associations d’épargnants pour définir les quotas de private equity à intégrer. Ils doivent être confirmés dans le décret d’application de la loi d’ici sa mise en vigueur. |
Private equity : le ticket d’entrée va beaucoup baisser
Jusqu’à présent, pour accéder au marché du private equity, il faut soit investir en direct dans une société, soit, comme c’est le cas généralement, à travers des fonds spécialisés distribués par des banques ou des établissements des gestion de patrimoine. Il en existe plusieurs : FCPR (Fonds communs de placements à risques), FCPI (Fonds communs de placements dans l’innovation), FIP (Fonds d’investissements de proximité). Toutefois, le ticket d’entrée s’avère très élevé : comptez au minimum 100 000 euros et jusqu’à plusieurs millions d’euros pour les fonds les plus renommés, sans compter les frais de gestion appliqués (en général environ 2% et 20% de commission de surperformance).
Avec la loi relative à l’industrie verte, l’investissement en capital-risque via l’assurance-vie ou le PER va permettre de démocratiser l’accès au private equity, en réduisant considérablement ce ticket d’entrée, d’un millier à quelques milliers d’euros.
Private equity : un placement peu liquide et risqué, mais très rentable
Le private equity est un secteur réputé pour être peu liquide (les fonds sont en général bloqués pour 5 ans au minimum) et particulièrement risqué. En effet, il faut plusieurs années à une entreprise non cotée en Bourse pour acquérir une croissance stable et une rentabilité certaine. De plus, ces sociétés sont particulièrement dépendantes du cadre réglementaire, particulièrement mouvant. En somme, le capital-investissement présente un risque de perte en capital non négligeable, voire totale en cas de faillite.
En contrepartie de l’illiquidité et de la prise de risque, les rendements du private equity s’avèrent très élevés. La performance annuelle du secteur a atteint 15,2% fin 2022 selon une étude EY pour France Invest. Sur les 10 dernières années, le rendement annuel moyen s’est affiché à 14,2%. Soit bien au-delà de toutes les autres classes d’actifs : 10,4% pour les actions du CAC 40 et 5,6% pour l’immobilier.
Les assureurs préparent le changement
De leur côté, les assureurs s’activent et s’organisent, face à ce changement important de la législation. Ils travaillent à l’intégration d’actifs verts en private equity dans leurs produits d’épargne. Ils travaillent également sur la création de nouveaux contrats d’assurance-vie et/ou des PER axés sur la transition écologique, le développement durable et les énergies renouvelables. Voire de développer des fonds spécifiquement alloués aux placements verts.
Bon à savoir Pour faciliter l’identification des fonds respectant des engagements environnementaux et investissent dans la décarbonation de l’économie, la loi “Industrie verte” prévoit de créer un nouveau label : le “label Industrie verte”, qui aurait pour objectif de décliner le label « Triple E » à l’épargne privée. |
Le jeu en vaut la chandelle : dans son étude d’impact, Bercy évoque des flux de collecte de 1,5 à 3 milliards d’euros par an pour le non coté en assurance-vie (contre 613 millions d’euros en 2022) et entre 1 et 2 milliards d’euros par an.
La fiscalité du private equity en direct vs en indirect
Investir dans le private equity en direct vous permet de bénéficier d’avantages fiscaux. Concernant l’investissement en direct dans des sociétés non cotées, les fonds dits “fiscaux” offrent des réductions d’impôts. Ainsi, les FCPR proposent une exonération d’Impôt sur le revenu sur les plus-values. De leur côté, les FCPI et les FIP permettent de réduire votre impôt sur le revenu jusqu’à 18% du montant investi (de plus, les plus-values sont également exonérées d’IR). Dans tous les cas, les prélèvements sociaux de 17,2% s’appliquent.
Concernant l’investissement en indirect dans le capital-investissement via une assurance-vie, il permet de bénéficier de tous les avantages proposés par l’assurance-vie en général. A savoir :
- Les gains réalisés sont imposés uniquement en cas de retrait.
- Si le contrat a plus de 8 ans, les plus-values sont moins imposées : 7,5% d’impôt sur le revenu et prélèvement sociaux de 17,2%, après un abattement de 4 600 euros pour une personne et 9 200 euros pour un couple.
- L’assurance-vie permet d’éviter le “frottement fiscal”.
Quant aux PER, leur fiscalité est très avantageuse – et unique – à l’entrée. En effet, cette enveloppe permet de déduire de ses impôts les versements, dans la limite de 10% du Plafond de la Sécurité sociale (PASS). De plus, durant la vie du contrat, dans le cadre du PER, tant que le capital est bloqué, les gains ne sont pas fiscalisés.
La fiscalité du private equity diffère selon que l'investissement est réalisé en direct ou via une assurance-vie ou un PER. Il est important de bien vous renseigner auprès de votre banquier privé Louvre Banque Privée sur les avantages fiscaux propres à chaque type d'investissement avant de faire votre choix.