Flash info : Les marchés vaccinés ?
Le 13/11/2020Lundi 9 novembre euphorique sur les places financières
Le début du mois de novembre de l’année 2020 restera dans les annales boursières. Le dénouement des élections américaines et surtout l’annonce, le lundi 9 novembre, des résultats très prometteurs du vaccin contre le virus du Covid-19 du partenariat entre la société Pfizer et la biotech BioNTech, ont fait flamber les bourses mondiales (+7,6% pour le CAC 40). Elles ont plus particulièrement déclenché une rotation sectorielle et thématique qui a fait littéralement s’envoler les valeurs qui avaient été jusqu’à présent très durement touchées par les conséquences économiques de la crise sanitaire (+12,3% pour le secteur bancaire, +10,4% pour les pétrolières et +7% pour les titres Transport & Loisirs).
Ces réactions sont-elles normales ou surprenantes ?
Les réactions aux résultats préliminaires extraordinaires du candidat-vaccin de Pfizer-BioNTech (90% de taux d’efficacité !) semblent tout à fait rationnelles. Si les chiffres finaux le confirment, ce taux d’efficacité permettrait notamment d’atteindre plus facilement le seuil d’immunité collective pour rompre la transmission du virus. Les anticipations de retour à la normale de la vie économique, à partir du second semestre de 2021, s’en trouveraient donc renforcées. Bien entendu, l’ampleur de ces rebonds s’explique aussi, et surtout, par le fait que de nombreux investisseurs étaient sous pondérés, absents, voire vendeurs à découvert, sur ces titres ou sur ces secteurs dits « value » et qu’ils ont dû donc se racheter en mode quasi-panique.
En revanche les réactions, certes plus limitées, aux résultats des élections américaines sont plus surprenantes. Les marchés ont en effet réagi globalement positivement malgré l’absence d’une « vague bleue » démocrate, synonyme de forte relance économique, et malgré le scénario tant redouté d’une contestation des résultats par le camp républicain.
Faut-il déjà refermer 2020 et se projeter sur l’année 2021 ?
Nous pensons que l’annonce de vaccin est plus qu’un espoir. C’est une étape fondamentale qui aura pour conséquence certaine de pousser les investisseurs à revoir à la hausse leurs anticipations de croissance économique et de résultats bénéficiaires, d’autant que l’on attend au cours des deux prochains mois les résultats des vaccins des laboratoires Moderna et Astrazaneca. Cependant, ce n’est pas encore complètement un tournant, ou «game changer» pour reprendre une expression très populaire chez les boursiers. La route vers un déploiement de ce vaccin, de manière visible à partir du second semestre de 2021, ne sera pas sans obstacles. Il faudra, tout d’abord et bien entendu, qu’ils reçoivent la validation des autorités sanitaires, celle de la FDA américaine étant attendue pour fin novembre. Sa logistique posera également des défis puisqu’il faut, dans le cas de ce vaccin, des conditions de température extrême (-34 degrés) pour le conserver et le transporter. Il subsistera ensuite des interrogations notamment sur la durée d’immunité qu’il apporte.
La dynamique sanitaire reste par ailleurs très préoccupante. De l’aveu même de la très grande majorité des experts nous rentrons dans une période, l’hiver et les fêtes de fin d’année, très propice à la propagation du virus. De plus, les reconfinements 2.0 vont entraîner une contraction de la croissance économique en Europe au moins sur le quatrième trimestre. La conjoncture américaine reste encore dynamique mais les statistiques sanitaires s’affolent de nouveau de l’autre côté de l’Atlantique. Certains conseillers sanitaires de Joe Biden l’exhortent déjà à inciter les Etats fédérés à mettre en œuvre des politiques de confinement après son investiture du 20 janvier.
Toutefois, et malgré tous ces facteurs d’incertitudes à court terme, Il faut garder à l’esprit que cette situation économique très difficile et inédite est liée à un choc exogène, le virus du covid, et non pas à un déséquilibre économique ou financier. Dans ces conditions, il parait raisonnable de mettre une probabilité plus élevée au scénario du retour à la vie économique normale à partir du second semestre de 2021. Donc s’il ne faut pas déjà complètement refermer 2020, il faut commencer à positionner les portefeuilles pour une année 2021 logiquement plus prometteuse … si les vaccins sont bien au rendez-vous.
Quels sont les ajustements que nous avons ou que nous pensons réaliser dans les mandats de gestion ?
Nos portefeuilles sont bâtis en fonction de quatre grandes convictions :
D’une part, nous considérons que nous avons changé de régime avec dorénavant un potentiel de hausse plus important. Dans ces conditions, nous avons renforcé nos expositions aux actions tout en gardant un léger volant de liquidités pour profiter de toute séquence de consolidation.
D’autre part, nous estimons que la perspective d’un retour à la normale, même graduel, dans la seconde partie de l’année 2021, impose des structures sectorielles et surtout thématiques plus équilibrées. Nous avons par conséquent réduit notre exposition sur les actifs défensifs, comme par exemple nos positions sur le marché suisse et les valeurs agro-alimentaires, pour renforcer nos investissements sur la thématique cyclique et revenir partiellement sur certains segments des valeurs décotées (« value ») comme les banques ou les titres domestiques britanniques. Pour autant, nous ne faisons pas une rotation à 180 degrés vers des thématiques risquées (nous restons, par exemple, à l’écart du secteur pétrolier et encore sous pondérés sur les financières). Par ailleurs, nous gardons des positions significatives sur les valeurs et thématiques de qualité, soutenues par des tendances stratégiques de long terme : les sociétés avec des bilans sains, le digital et bien entendu les entreprises qui vont profiter de la transition énergétique et écologique et qui sont bien notées selon les critères ESG.
Ensuite, et c’est notre troisième conviction, nous augmentons nos investissements dans les marchés émergents. L’annonce actuelle, et à venir, de vaccins est un vrai tournant pour nombre de pays émergents, comme le Brésil ou l’Inde. Mais nous maintenons notre préférence pour les marchés asiatiques et plus particulièrement pour la Chine. Pékin est en effet un des grands gagnants de cette crise du Covid : Son régime centralisé lui a permis de gérer avec succès cette crise sanitaire, la reprise économique continue de surprendre positivement (c’est le seul pays dont la croissance ne sera pas négative en 2020) mais surtout, la Chine a renforcé son leadership économique et géopolitique. L’appréciation marquée du yuan, en pleine crise du commerce mondial (+8% depuis la mi-mai contre le dollar américain), tolérée par les autorités chinoises, confirme que Pékin souhaite faire de sa monnaie une référence pour s’affranchir de l’hégémonie financière et politique du billet vert et inciter ses partenaires à commercer dans sa devise. Au fond, tout semble se passer comme si la Chine déroulait ses ambitions stratégiques avec deux modèles historiques pour exemple : reproduire une sorte de plan Marshall avec son projet de nouvelle route de la soie et faire du yuan, à terme, le «deutschmark de l’Asie».
Enfin, même si 2021 devrait être l’année du retour graduel à la normale, les politiques monétaires vont continuer à inonder les marchés de liquidités grâce à leurs rachats d’actifs («QE»). La BCE va augmenter la taille de son programme d’urgence lié à la pandémie (PEPP) et la Réserve Fédérale a promis un financement inconditionnel à Washington. L’amélioration de la visibilité économique, née de la perspective de mise à disposition de vaccins, et cette liquidité très abondante nous poussent à renforcer nos investissements sur les obligations privées, en acceptant d’aller sur des titres de notation moyenne afin d’accroître le rendement courant des mandats de gestion diversifiés.
Rédigé par la direction de la Gestion Sous Mandat
le 13 novembre 2020 à 17 h 00.